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Les grands gagnants des Sony World Photography Awards 2024

Après l’annonce le mois dernier des finalistes, les grands gagnants des Sony World Photography Awards 2024 viennent d’être dévoilés. Cette édition a battu des records avec la soumission de plus de 395 000 œuvres, marquant un jalon historique pour ce concours qui fête ses 17 ans. La photographe française Juliette Pavy a remporté le titre prestigieux de Photographe de l’année pour son projet documentaire sur les femmes groenlandaises. 

Photographe de l’année : Juliette Pavy

La photographe française Juliette Pavy a capté l’attention générale et remporté le prestigieux titre de photographe de l’année grâce à sa série intitulée Spiralkampagnen : Contraception forcée et stérilisation involontaire des femmes groenlandaises. Outre un prix de 25 000 $ (USD), elle a également reçu un assortiment d’équipements photographiques Sony, une visibilité mondiale en ligne et profitera d’une présentation solo à Somerset House dans le cadre de l’exposition Sony World Photography Awards de l’année prochaine.

Entre 1966 et 1975, les femmes inuites du Groenland ont subi un programme de contrôle des naissances forcé appelé Spiralkampagnen (campagne en spirale). Orchestrée par les autorités danoises, cette initiative a impliqué l’implantation de près de 4 500 dispositifs intra-utérins (DIU), surnommés « spirales », chez des femmes et des filles inuites, certaines n’ayant que 12 ans. Beaucoup ont déclaré que cette procédure avait été effectuée sans leur consentement. Révélée initialement par un podcast danois au printemps 2022, cette campagne a été documentée par des preuves attestant que les autorités visaient à limiter la croissance démographique inuite. Une enquête officielle a été lancée et devrait être conclue fin 2024.

Pavy se sert de photographies de paysages, de portraits, de films d’archives et d’images radiographiques pour illustrer l’histoire. L’ensemble de la série met l’accent sur les personnes affectées par le programme gouvernemental, examine le rôle des médecins participants et s’intéresse au législateur danois qui mène une enquête sur l’initiative.


Gagnant catégorie architecture : Siobhán Doran

Cette série est tirée d’un projet pour un livre intitulé « Houses that Sugar Built: An Intimate Portrait of Philippine Ancestral Homes », qui m’a permis d’explorer ces demeures pleines d’histoire. Ma méthode consistait à photographier ces maisons avec un fond sonore, souvent pendant que mon collaborateur recueillait les récits du propriétaire ou du gardien, bien que parfois je travaillais en silence. Le « sala mayor » ou salon principal, révèle souvent le style architectural et le mode de vie des résidents, tout en laissant au spectateur la liberté d’interpréter ces espaces uniques à sa façon.


Gagnante catégorie créative : Sujata Setia

Inspirée par l’ancienne méthode de torture asiatique du lingchi (la mort par mille coupures), « A Thousand Cuts » est une série en cours de portraits et de récits qui explore la violence domestique au sein de la communauté sud-asiatique à travers la photographie. J’ai utilisé le lingchi de manière métaphorique pour illustrer la nature répétitive de la violence domestique. Cette violence continue qui érode l’âme de la victime est représentée par des incisions sur le portrait du participant, et les impressions sont réalisées sur du papier délicat pour souligner la vulnérabilité de l’être. L’œuvre finale est capturée dans un cadrage serré, renforçant un sentiment de confinement et de restriction de mouvement.


Gagnante catégorie environnement : Mahé Elipe

L’abeille Melipona, une espèce sans dard, est rare et vénérée comme sacrée par les Mayas, qui attribuent à son miel des vertus miraculeuses. Cette abeille symbolise également la résilience des communautés indigènes de Hopelchén, Campeche, située dans le sud-est du Mexique, face aux dommages causés par l’agro-industrie. En mars 2023, un événement tragique a touché plus d’une centaine d’apiculteurs : leurs abeilles Melipona ont été décimées par le fipronil, un insecticide banni dans de nombreux pays européens mais toujours légal au Mexique. Cette catastrophe a laissé des traces indélébiles sur les Mayas, pour qui la survie dépend du précieux nectar du Melipona. L’agriculture intensive continue de ravager la péninsule du Yucatan, repoussant les forêts anciennes et mettant en péril les pratiques traditionnelles. Les images capturées montrent la ferme volonté du groupe Ka Kuxtal Much’Meyaj de préserver, par la résistance individuelle et collective, un héritage précieux pour les générations futures.


Gagnant catégorie paysage : Eddo Hartmann

Cette collection photographique nous transporte dans une région isolée du Kazakhstan, connue sous le nom de « Polygone », qui fut le principal site d’essais nucléaires de l’Union soviétique. Entre 1949 et 1989, plus de 450 explosions nucléaires y ont été réalisées, sans égard pour les conséquences sur les habitants locaux ou l’environnement. Les effets des radiations sont restés dissimulés par les autorités soviétiques jusqu’à la fermeture du site au début des années 90, moment où l’ampleur des dégâts a été enfin exposée. Aujourd’hui, le site reste fortement radioactif et ne peut être exploré qu’avec un équipement de protection spécialisé.

Les images de cette série ont été prises avec une caméra infrarouge, mettant en lumière une menace invisible : les radiations des essais nucléaires. Les plantes qui ont absorbé ces radiations apparaissent dans une teinte rouge-violet distinctive, un signe de contamination qui serait autrement invisible sans cette technologie.


Gagnant catégorie portfolio : Jorge Mónaco

Ces photographies font partie de plusieurs de mes projets personnels, avec certaines œuvres se distinguant pour former des pièces autonomes. Je privilégie la sincérité et l’authenticité, invitant les spectateurs à se plonger dans les récits personnels des sujets. Par ailleurs, je réalise également des projets en plein air qui offrent des contextes sociologiques enrichissant le contenu visuel. Mon but est de mettre en avant les vies des individus appartenant à des groupes minoritaires, qu’ils soient définis par leur ethnie, leur religion ou leur genre, afin de sensibiliser et de promouvoir l’inclusion tout en offrant une réflexion sur la diversité humaine.

Dans cette collection, on trouve également des travaux issus d’un projet en cours qui examine le « paysage intermédiaire » ; ces zones qui se situent entre l’urbain et le naturel, souvent à la périphérie des villes. Ces espaces, généralement ambigus ou indéfinis, constituent le cadre de ces explorations.


Gagnante catégorie portrait : Valery Poshtarov

Dans un monde qui semble de plus en plus distant, se tenir la main devient une prière muette – un moyen de renouer. Pour la première fois en des années, voire des décennies, pères et fils se tiennent la main devant l’objectif. Ce moment, souvent marqué par l’hésitation ou même la résistance, revêt une puissance émotionnelle intense. Cet échange d’intimité est devenu l’essence de ce projet, les photographies servant simplement à documenter l’affection longtemps non exprimée entre ces hommes. S’étendant à travers différentes cultures et touchant des régions comme la Bulgarie, la Géorgie, la Turquie, l’Arménie, la Serbie et la Grèce, ce projet s’est transformé en un symbole d’expression émotionnelle et de conservation culturelle. Il offre une plateforme mondiale, incitant pères et fils du monde entier à participer à ce geste. En dépassant les récits personnels, ces portraits deviennent des toiles ouvertes à l’interprétation, et j’encourage les spectateurs à y projeter leurs propres significations, faisant de chacun un co-créateur de cette histoire humaine en constante évolution.


Gagnant catégorie sport : Thomas Meurot

Kald Sòl est une série issue de mon travail de documentation d’une expédition de surf en Islande durant l’hiver, qui a également donné naissance à mon premier documentaire portant le même titre. J’ai toujours été fasciné par le surf dans des conditions froides, donc quand l’opportunité de documenter cela s’est présentée, je l’ai immédiatement saisie. Les photographies en noir et blanc capturées durant cette expédition rendent palpable la sensation de froid, même sous un soleil éclatant.


Gagnante catégorie animaux sauvages et nature : Eva Berler

Vous pouvez retrouver toutes les photos de chaque gagnant, ainsi que les images des finalistes des Sony World Photography Awards 2024 sur le site worldphoto.org.

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