La photographie animalière de nuit : réglages et techniques
La nuit, alors que le monde semble endormi, une multitude d’animaux s’éveille et s’active dans l’obscurité. Dans cet univers où règnent la noirceur et le silence, les possibilités photographiques sont uniques pour dévoiler la vie secrète et mystérieuse qui rôde dans nos forêts la nuit. Les défis techniques sont cependant nombreux et impliquent d’utiliser un matériel adapté et de prendre le contrôle des réglages de l’appareil photo. Les méthodes d’approche doivent être adaptées à cet environnement si particulier.
Quels animaux nocturnes photographier ?
Si les lions, les éléphants et autres animaux des plaines africaines sont les plus souvent associés à la photo de nuit, sachez que vous n’aurez pas toujours besoin de voyager loin. Des mammifères tels que les renards, les hérissons ou les chauves-souris, aux oiseaux nocturnes comme les hiboux et les chouettes, en passant par les insectes et les amphibiens, d’innombrables animaux peuvent être photographiés de nuit dans nos régions.
Il est important de se documenter sur les espèces que l’on souhaite photographier pour mieux connaître leur habitat, leur mode de vie et leurs habitudes. Les animaux nocturnes ont des modes de vie et des comportements différents de ceux des animaux diurnes. Ils peuvent être solitaires ou vivre en petits groupes, et leur activité est souvent concentrée durant les heures où la luminosité est faible, comme à l’aube ou au crépuscule. Ces animaux ont développé des aptitudes leur permettant de vivre et de chasser dans l’obscurité, comme des yeux plus sensibles, une ouïe plus fine ou une vision infrarouge. De nombreux animaux diurnes ont également adapté leurs habitudes pour limiter les confrontations avec les humains. Cela est notamment le cas des chevreuils, des cerfs ou des lapins qui sont plus facilement observables à la tombée de la nuit ou au lever du jour, là où l’activité humaine est faible.
Entre chien et loup
De nombreux photographes ne commencent à prendre des photos que lorsque le jour est bien établi et arrêtent dès que le soleil se couche. Cette approche limite considérablement les possibilités d’obtenir des images uniques. En outre, c’est précisément à ces moments que de nombreuses espèces animales sont les plus actives. Pendant cette courte période, vous pouvez tirer parti de la faible lumière de l’heure bleue, permettant d’obtenir plus facilement une exposition correcte qu’en pleine nuit.
L’heure bleue est la période qui précède le lever du soleil et qui suit le coucher du soleil, lorsque le ciel présente une teinte bleu profond. La durée de l’heure bleue varie en fonction de la latitude et de la saison, mais dure généralement entre 20 et 40 minutes. Durant cette courte période, la lumière est douce et diffuse, créant une ambiance paisible et mystérieuse. La faible luminosité de l’heure bleue impose d’adapter les réglages de l’appareil (ouverture, vitesse d’obturation et sensibilité ISO) pour obtenir une exposition correcte. N’hésitez pas à utiliser des vitesses d’obturation plus lentes et à augmenter la sensibilité ISO, tout en veillant à éviter les flous de bougé et le bruit numérique excessif.
Photographier avec la lune
La lune est souvent l’unique source de lumière disponible pour photographier les animaux de nuit. Essayez ainsi de planifier vos sorties en fonction du calendrier lunaire pour être sur place au moment de la pleine lune. Celle-ci offre un éclairage nocturne maximal. Elle facilite la photographie animalière en apportant suffisamment de lumière pour obtenir une exposition correcte du sujet et du premier plan, sans avoir recours à une source artificielle. Vous pouvez aussi photographier avec une demi-lune. Cela permet d’obtenir un certain niveau de lumière tout en conservant une atmosphère mystérieuse. L’éclairage sera cependant plus modéré, impliquant de travailler avec des silhouettes ou d’utiliser une vitesse d’obturation étendue. Photographiez idéalement dans un espace dégagé et en dehors des zones de sous-bois pour capter toute la lumière diffusée par la lune.
Photographier avec une lumière artificielle ?
L’usage de la lumière artificielle en photo animalière est très controversé. Il est préférable de travailler avec la lune ou dans des zones où la pollution lumineuse est malheureusement déjà établie, comme les périphéries urbaines, les abords des routes et les zones industrielles. Si vous décidez d’utiliser un éclairage artificiel malgré tout, préférez une source de lumière continue, car un flash peut causer du stress chez les animaux. Des lampes frontales, des projecteurs ou des lampes de poche peuvent être utilisés pour repérer les animaux. Veillez à utiliser une intensité lumineuse faible et à ne jamais diriger la lumière directement dans les yeux des animaux nocturnes. Lorsqu’ils sont exposés à une lumière vive, il peut leur falloir plusieurs heures pour retrouver leur vision nocturne. Pendant ce temps, ils peuvent être vulnérables aux prédateurs ou incapables de chasser.
Orientez la lumière vers un arbuste ou un arbre proche des animaux plutôt que de les éclairer directement. La réflexion de la lumière sur la végétation environnante devrait suffire à les éclairer pour que vous puissiez les photographier tout en préservant leur vision nocturne. Capturez rapidement l’image pour désactiver dès que possible l’éclairage. Si vous devez photographier un sujet immobile, comme un lion dévorant une proie fraîchement attrapée, il ne sera pas nécessaire de prendre d’innombrables images. Éteignez la lumière après quelques clichés, et rallumez-la uniquement si vous avez besoin de prendre une nouvelle photo, par exemple, lorsqu’il se déplace ou change de position.
Quel objectif utiliser ?
En photographie animalière, on recommande généralement l’usage d’un téléobjectif à très longue portée pour capturer en gros plan la faune. Cependant, ces objectifs sont généralement dotés d’une petite ouverture, ce qui limite la capture de la lumière. Seuls de rares modèles professionnels à focale fixe font exception, mais le tarif dépasse rapidement plus de 10 000 euros. Pour cette raison, un objectif de 70-200 comme le Sony FE 70-200 mm f/2.8GM OSS, Canon EF 70-200mm f/2.8 L ou Nikon Z 70-200mm f/2.8 S VR forme un investissement plus abordable. Il offre une grande ouverture tout en conservant une portée confortable pour des animaux peu éloignés. Dans des environnements très sombres, un objectif de 135 mm comme le Sony FE 135 mm F1.8 GM sera encore plus efficace.
La nuit, il est généralement préférable d’éviter les gros plans très rapprochés des animaux. C’est pourquoi une focale de 200 mm, voire 135 mm, peut suffire. En effet, plus l’animal occupe de l’espace dans le cadre, plus ses mouvements sont visibles. Étant donné que la photographie animalière nocturne nécessite l’utilisation d’une vitesse d’obturation plus lente qu’en plein jour, il est fort probable que l’animal se déplace entre le début et la fin de prise de vue. Si l’animal est plus petit dans le cadre, ses mouvements seront moins significatifs, ce qui maximise la netteté. Par conséquent, il est possible d’utiliser un objectif grand angle très lumineux, comme le Sigma 35 mm F1, 4 DG HSM Art, Laowa Argus 45mm f/0,95 ou Sony FE 50 mm f/1,4, pour réduire les mouvements et réaliser un portrait environnemental. Cette composition fonctionne mieux lorsque la lune éclaire en partie le paysage.
Quels réglages utiliser ?
La première chose à faire est de placer votre appareil en mode manuel (M) pour avoir un contrôle total sur les réglages. Optez pour une ouverture la plus grande possible pour maximiser la quantité de lumière qui atteint le capteur photo. Une valeur de f/2.8 est un standard, mais vous pouvez aussi utiliser un objectif de f/1.8 ou même f/1.2. Généralement, une sensibilité ISO élevée est nécessaire pour prendre des photos d’animaux nocturnes en raison de la faible luminosité disponible. Vous devrez souvent pousser les capacités de l’appareil avec des valeurs ISO proches de 6400. Ne craignez pas d’avoir un peu de bruit sur vos images, car c’est souvent inévitable pour obtenir une exposition correcte la nuit.
Le réglage de la vitesse d’obturation est plus compliqué, car cela dépend grandement de la situation. La nuit, la lumière est si faible qu’il est difficile d’utiliser les réglages couramment employés en photographie animalière. Vous pouvez tenter d’expérimenter avec des vitesses d’obturation comprises entre 1/80s et 1/250s si vous effectuez un très court balayage de lumière près du sujet. Il sera cependant indispensable d’avoir un appareil parfaitement stable et que le sujet ne bouge pas.
Bracketing et images composites
Pour augmenter vos chances d’obtenir une exposition adéquate, activez le mode de bracketing d’exposition avec une valeur de +/- 1 IL. Ce mode permet de prendre plusieurs photos avec des expositions légèrement différentes, vous donnant ainsi la possibilité de choisir celle qui offre le meilleur résultat. Par exemple, si vous définissez une vitesse de 1/100s, l’appareil va également réaliser une image à 1/50s et à 1/200s.
Il est aussi possible de créer une image composite à partir de plusieurs photos. Par exemple, vous pouvez réaliser une première exposition de 20 à 30s pour exposer le paysage et capturer les étoiles, puis une seconde plus courte pour photographier le sujet sans risque de floue. Ensuite, vous pourrez réunir les deux photos dans une seule image à partir d’un logiciel comme Photoshop. Il se peut que vous ayez besoin d’effectuer quelques modifications concernant l’exposition et l’alignement, mais en évitant de déplacer l’appareil photo, le processus sera grandement facilité.
Réaliser une silhouette
Si vous n’arrivez pas à exposer correctement le sujet, vous pouvez vous contenter de photographier sa silhouette. Pour ce faire, positionnez le sujet face à un arrière-plan plus lumineux comme la lune, un coucher de soleil ou un lac éclairé par la lueur du ciel. Cela permettra de créer un contraste entre le sujet et l’arrière-plan, mettant en valeur la silhouette de l’animal. Effectuez la mise au point sur le contour de l’animal et ajustez les réglages de votre appareil pour que l’exposition corresponde à la luminosité de l’arrière-plan et non à celle du sujet. Cela assombrira l’animal, créant ainsi l’effet de silhouette désiré.
Explorer les merveilles de la nuit
La clé pour réussir en photographie animalière nocturne réside dans la patience, la persévérance et l’adaptabilité. En choisissant le matériel adapté et en maîtrisant les techniques de prise de vue en conditions de faible luminosité, vous serez en mesure de réaliser des clichés spectaculaires et d’élargir votre répertoire en tant que photographe animalier. Soyez prêt à relever les défis et à apprendre de vos expériences, tout en respectant la nature et les animaux que vous immortalisez.
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